Marcelle a pris du poids. Trois repas par jour et peu de tâches au quotidien. Sa vie a changé. Elle ne fera plus le ménage, l’épicerie, la cuisine, démarrer des semis, rempoter des plantes, emballer des cadeaux … Elle a ses crayons et ses pinceaux sur une table pliante. Des photos de famille et ses cadres au mur. La radio sur le bord de la fenêtre. La télé sur ce qu’on a appelé « le bras canadien », un support extensible. Trois pas séparent le lit de la commode, elle fait vite le tour de son domaine.

Elle a quitté sa cuisine-établi-atelier, sa salle-à-manger-serre-salle-de-couture, son salon-salle-d’exposition, sa chambre-à-coucher-bureau, ses balcons-jardins-lieux-de-rêverie. Chacune des pièces de son appartement servait à plusieurs activités. Maintenant ses activités se tiennent au Centre de jour.

Un mini-bus vient cueillir les pensionnaires de chez C deux fois par semaine. Marcelle fait partie des enthousiastes. Elle aime chanter, jouer, identifier les personnages célèbres apparaissant sur des photos, deviner. Le Centre de jour a trouvé une participante modèle. Elle va aussi aux réunions de la Société Alzheimer, où elle peint et dessine avec d’autres. « Il y a même un médecin! Comme quoi, cette maladie touche tout le monde », constate-t-elle. Pas de hiérarchie, pas de classes sociales.

Elle qui fréquentait la bibliothèque, allait au musée, au jardin botanique, suivait des cours, gardait les chats, prenait soin du jardin de vacanciers au loin, qui n’aurait jamais pensé s’inscrire à « des activités de vieux ». La voici « stimulée » par des animateurs spécialisés en loisirs, qui veulent faire bouger ses neurones et lui faire lancer des poches.

Nouvel objectif de vie : ralentir la progression de la démence. Qu’elle reconnaisse ses enfants et ses petits-enfants le plus longtemps possible.